• AF > AG

    affaler    Empr., pour le sens 2, au néerl. afhalen « faire descendre, abaisser ». Le sens 1 fait difficulté.  EWFS2fait appel à un croisement avec néerl. afvallen qu'il traduit par « tomber sur le côté sans pouvoir se  relever ». Valkh. 1931, pp. 42-43 et Jal 1970 voient dans fr. affaler deux mots, le sens 2 remontant au néerl.  afhalen, le sens 1 au néerl. afvallen « tomber » et, selon Valkh. « tourner par suite d'un vent contraire »; cette  division est jugée inutile ds FEW t. 15, s.v. afhalen. Il reste que dans le sens 1 il s'agit d'un complexe sém. où  quatre éléments sont intimement unis : a) le vent (qui pousse), b) le bateau (qui est poussé), c) la côte (vers  laquelle il est jeté), d) où il risque d'échouer ou de rester immobile. Aucun de ces éléments ne se trouve dans le  sens 2, seuls le domaine et l'idée d'un mouvement étant communs aux deux sens. Peut-être le m. néerl. afhalen,  qui peut signifier « enlever », a-t-il dans ce second sens également servi de point de départ au sémantisme du  verbe fr.; la difficulté serait alors repoussée vers l'étymon.

    affûtiau    1680 plur. pop. « menus objets de peu de valeur » (Hauteroche, Crispin médecin, II, 11 ds Dict. hist. Ac. fr. t. 2 1884, p. 311 : Je ne saurois trouver dans tous vos affûtiaux).
    Dér. de affûter* « disposer, ajuster »; suff. -iau*; forme dial. pour *affuteau.

    affiquet    Terme normanno-pic. (Dum. 1849, p. 7; Corblet 1851, p. 259; Jouanc. t. 1 1880, p. 10), dér. (suff. -et*) de l'a. fr. affique « attache, boucle » (dep. le xiiie s., Jean de Garlande, Dictionarius, éd. A. Scheler, 296, ds T.-L. : monilia : nuches, affiqués [affiqués peut être une graphie pour affiquez = affiquets]) forme normanno-pic. (Dum., Corblet, Jouanc., loc. cit.) de l'a. fr. affiche (attesté au même sens dep. 1200, Escoufle, éd. Michelant et Meyer, 3835, ds T.-L. : Puis la [l'aumosniere] ratache a une afiche Quarree a pierres, bele et riche Dont ele ot son col afichié), voir affiche et colifichet. La forme franc. corresp. à affiquet est l'a. fr. affichet (dep. le xiiie s. « colifichet, bijou », Du Vallet qui se met a malaise ds Montaiglon et Raynaud, II, 167 : Or a acaté li dansiaus Ses affichès et ses juiaus Pour la joie k'il se marie). Les raisons pour lesquelles la forme normanno-pic. a supplanté la forme franc. demeurent obsc.

    afforage, afférage, affeurage    Terme d'orig. pic. (supra; cf. Corblet 1851), dér. (suff. -age*) du pic. aforer « estimer, évaluer » (xiiie s. ds Gdf.; cf. Corblet, loc. cit.) lui-même dér. (préf. a-1*, dés. -er) de l'a. fr. fuer « prix des marchandises fixé par les autorités » (1160-1174, Rou ds T.-L.), du lat. forum, attesté en lat. médiév. carol. au sens de « prix du marché » (anno 744, Pippini capit. Suess., c. 6 Capit., I, p. 30 ds Nierm. t. 1 1954-58 : [Unusquisque episcopus] per omnes civitatis [lire civitates] legitimus forus [lire legitimos foros] et mensuras faciat secundum habundantia temporis).

    affouré(e)    Terme normanno-pic. (FEW t. 152, p. 154a), dér. de affourer « donner du fourrage » (fin xivdéb. xves., Christ. de Pisan ds Gdf.), bien attesté dans la région normanno-pic. (FEW, loc. cit., et Gdf.), lui-même dér. de l'a. fr. fuerre, forre « fourrage » (1remoitié xiies. ds T.-L.) de l'a. bas frq. *fodar « nourriture des animaux ».

    affrioler    Dér. du m. fr. frioler propr. « frire » (1393, Ménagier ds Gdf.), fig. « brûler de désir, être avide » (Jehan des Preis, Geste de Liege, 12 686, Scheler, Gloss. philol., ibid. : fils al duc de Borgongne qui de bonteit friolle); préf. a-1*. Frioler (dér. de frire*, d'apr. un processus difficile à expliquer) est bien attesté dans les dial. du Nord-ouest (FEW t. 3, p. 789 b) spéc. le norm. (Moisy 1885 : Frioler. Avoir grand envie, brûler de désir [...] aussi usité activement avec le sens d'affrioler : V'là du fricot qui m'friole); cf. l'adj. m. fr. friolet « (d'une pers.) friand », xives. ds Gdf.

    afrikaans, afrikaner    (désigne aussi une plante, la tagète, ou tagette, en néerlandais, genre de l'œillet d'Inde et de la rose d'Inde. D'autres espèces sont appelées « souci français »)     du néerl. "Africain", langue des Afrikaner (En Afrique du Sud, on utilise de plus en plus le terme « afrikaans » comme relatif à l'appellation ethnique en préférence à « afrikaner ». Ce dernier mot signifiait d’abord un Africain tout simplement, mais au XIXe siècle il a pris le sens d’un Africain issu exclusivement des colons européens de la Colonie du Cap hollandaise. Du fait de l’accent mis par ces derniers sur une idéologie de domination européenne (apartheid), le terme « afrikaner » a pris une forte connotation de suprématie blanche au XXe siècle) (wikipedia).

    agassin, agacin (cor au pied)    L'adj. pullinus a donné son suff. au représentant fr. de agaza, c.-à-d. à agace « pie ». Au xixes. agacin a été évincé en fr. par cor ou œil-de-perdrix. Il a d'ailleurs toujours été en concurrence avec d'autres formes (cf. FEW, loc. cit.) pour désigner le cor au pied : agaçon (qui a subi un changement de suff., cf. ci-dessus), les syntagmes du type œil d'agace, (ou par déformation nid d'agace) répandus dans le Nord et l'Est en bordure des lang. germ., et qui sont sans doute des calques directs du néerl. eksteroog et de l'all. dial. Elsterauge, et finalement un type wallon agace, obtenu par dér. régressive du syntagme précédent, si bien qu'en wallon la même forme peut signifier soit « pie » soit « cor au pied »; 2 issu de 1, p. anal. À noter qu'en lat. class. déjà oculus pouvait signifier « œil, tubercule d'une plante » cf. Plin., 17 Hist. Nat. 20, 33 (144), Caton R.R.6 etc. ds Forc. 1864-1926, s.v.

    agrafer    3 hyp. : 1. Soit dér. (préf. a-1*) du m. fr. grafer « attacher avec un crampon », xive-xves. (1364, Compte de J. Dou Four, Arch. KK 3b, fo44 vods Gdf. : Faire .VI. graffez de fer pour graffer le bort du puis du chastel qui estoit depeciez); (1490, Arch. K 272 ibid. : Graffes de fer pour graffer les entablemens de la viz d'icelle chappelle), lui-même dér. de grafe « crochet », xiiie-xves. : fin xiiies., a. pic. graffe (Ellebaut, Trad. de l'« Anticlaudianus » de Alain de Lille, éd. A. J. Creighton, 3226 d'apr. Långfors ds Neuphilol. Mitt., XLVII, 186 : A une aguille ou une graffe); 1313 grafe (Trav. aux chât. d'Artois, Arch. KK 393, fo38 ds Gdf s.v. grape : Grafes et chevilles de fer qui sont mis es galeries); 1490 graffe (Arch. K 272 ds Gdf loc. cit. : Pour .XIII. graffes de fer d'un pié et demi de long). Fr. grafe empr. à l'a. h. all. chrapfo (nomin. sing.) ixes., crapfun (acc. sing.) « uncinus » ds Graff t. 4, 1838, p. 596 s.v. krapho, m. h. all. krapfe « crochet » etc. (Lexer 1963), c-à-d. apr. la deuxième mutation consonantique, alors que les formes fr. graper et grape, c.-à-d. en -p- ou -pp-, remontent au germ. *krappa « crochet » passé sans doute en lat. vulg. av. la 2emutation consonantique (grappe* et grappin*). 2. Soit du m. fr. agraper avec influence de graffe « crochet » (voir ci-dessus). Fr. agraper « s'accrocher à, saisir » du xiieau début xviies. : 1184 (Thib. d. Marly Vers s. la Mort, XXX ds T.-L. s.v. : Mors est le mains qui tot agrape), dér. (préf. a-1*) de l'a. fr. graper « saisir », 1218-1225, (Les Miracles de la sainte Vierge, trad. et mis en vers par Gautier de Coincy, éd. Poquet, 118, 342 ibid. s.v. : Bien pëussiens aler graper, Sade virge, douce et piteuse, Se tu ne fusses retournee), lui-même dér. du fr. grape « crampon, agrafe, grappin », xiiie-xvies. (1213 L.-F. Flutre, Faits des Romains, 421, 16 ds Romania 65 [1939], p. 513 : Li vosoir en furent bien lié a dur ciment et a grosses grapes de fer bien seelees a plom). Cet a. fr. grape, remonte au germ. *krappa « crochet » entré en lat. vulg. av. la 2emutation consonantique. Le passage du groupe initial germ. kr- au fr. gr- s'explique par la faiblesse particulière des occlusives sourdes du germ., Fouché 1966, pp. 687-688. De ces deux hyp., toutes deux recevables, la première semble préférable, la seconde présentant quelque difficulté du point de vue chronol. 3. Soit, dans le cas de l'hyp. 1 de agrafe* : agrafer dér. de agrafe*, évolution parallèle à grafer dér. de graffe et à graper dér. de grape. Voir aussi agrapper, agriffer, agripper, grimper.
        Agrafer. Agrafer et agraper sont deux formes d'un même mot, l'f et le p permutant facilement. (Littré).

    agrappe, agrape     3 ce terme techn. mod., plutôt que néol. formé à partir de grappe « crochet » selon la 2e hyp. ds EWFS2, s.v. agrafe, semble être l'anc. mot agrape, donc déverbal de agrap(p)er*. Cette 1re hyp. ds EWFS2 paraît étayée par le fait que l'anc. forme agrape s'est maintenue dans les dial. pic. (déjà Mén. 1694 signale que les Picards prononcent agrape, cf. Corblet 1851, p. 262), de Liège (Haust 1933, p. 16), de Mons (Sigart selon Barbier Misc. t. 11, no 5, p. 140), de Namur (Remacle selon Barb. ibid.) etc.; ces régions étant des régions minières, on aura pris dans le dial. local une dénomination pour l'instrument nouv.

    agrès   1 déverbal de agréer2* (agreier) « équiper, mettre en état » plutôt qu'emprunt à l'a. nord. greidi (cf. De Vries Anord. 1962) « attirail, ustensiles, équipement » empl. surtout en poésie, l'a initial s'expliquant en outre plus facilement pour une forme verbale que pour un subst.; 2 déverbal de agréer2* « gréer un navire ». Les formes 2 et 3 sont devenues plur., car elles désignent différents accessoires que l'on pourrait énumérer. L'étymon néerl. gerei (cf. De Vries, Nederl., 1963) « apprêts, provision, fournitures, harnachement, ornement » fait difficulté à cause de la voyelle de la première syllabe. Pour éviter les rencontres homon. avec les mots de la famille issue de gré, les termes mar. de cette famille ont presque tous été supplantés par des formes simples : agréer2* par gréer*, agréement (début xviies., « action d'agréer ou de gréer un navire », Mémoire anonyme sur la conservation des vaisseaux dans les ports de Brest, Brouage et le Havre de Grâce, ms. Bibl. nat., no9594; fo35 ds Jal1− 1783 id. « gréement », Encyclop. Méthodique, Marine, p. 26) par gréement*, agréeur* par gréeur*; agrès a conservé son a-, l'homon. ne jouant pas dans ce cas avec les mots de la famille issue de gré, mais peut-être aussi à cause de l'existence du fr. grès, de sens différent.

    agriffer    Dér. de griffe*; préf. a-1*, dés. -er. Voir aussi agrafer, agrapper, agripper, grimper.
        De à et griffer (Littré).

    agrinche (mauvais garçon)    Dér. du verbe dial. grincher « faire des grimaces » (FEW t. 16, s.v. krîsan, p. 394 a et p. 395 note 8), forme normanno-pic. de grincer*.

    agripper    Dér. de gripper* [ca 1405]; préf. a-1*. Les gloses dès le xes. connaissent un lat. médiév. agrippare « tâter, palper » : anagrip : agrippare carnem feminae cum manu ds CGL t. 5 1894, p. 491, glose à l'édit de Rotharis, roi des Langobards. Agripper et gripper remontant à un étymon a. b.-frq., on peut s'étonner de la date tardive d'apparition de ces mots dans la lang. littér. Une des causes en est peut-être l'existence en a. fr. des mots de même sens, agrapper* et graper. Il n'est pas nécessaire de recourir au m. néerl. aengripen [« saisir »] (Verdam 1964) comme le fait Valkh. 1931, p. 152. Voir aussi agrafer, agrapper, agriffer, grimper.
        Autre forme d'agriffer, l'f se permutant sans peine en p. (Littré).

    aguicher    De l'a. fr. aguichier « garnir de courroies » ca 1285 (Le Roman du Chastelain de Coucy et de la Dame de Fayel, éd. Crapelet, 1057 ds T.-L. : Veissiés... Poitraus mettre et chevaus couvrir, Et ces fors escus aguicier [ : atachier]), lui-même de l'a. fr. guiche, guige « courroie par laquelle on suspendait le bouclier au cou » ca 1100 guige (Chanson de Roland, éd. Bédier, 3151 : Pent a sun col un soen grant escut let : D'or est la bucle e de cristal listet, La guige en est d'un bon palie roet), 1130-1160 guiche (Couronnement de Louis, 935, éd. Langlois ds T.-L. : Le paien a feru [...] Tote la guiche li desrompi del col, Qu'a terre chiet li bons escuz a or), cette dernière forme empruntée à un a. bas frq. *withthja « lien d'osier », tandis que guige représenterait un second empr. à une époque plus tardive, à un a. bas frq. *widdja « id. », cette dernière forme frq. étant le résultat d'un affaiblissement des spirantes (voir FEW t. 17 s.v. *withthja); l'a. bas frq. est étayé par l'a. fris. withthe, l'ags. widde, l'a. nord. vidja (De Vries Anord. 1962).
        Selon FEW les courroies permettant de porter les boucliers ont été fort longtemps en osier, ce qui permet de rejeter les autres étymol. avancées pour l'a. fr. guiche, guige, telles que lat. vulg. *vitica « vrille de la vigne » avec influence du germ. windan « tourner » (Dauzat, Fr. mod., t. 6, 1938, p. 18, no1) ou a. h. all. winting latinisé en windica « bande à enrouler autour des jambes » (FEW, loc. cit.).
        L'hiatus entre l'a. fr. aguicier et le fr. mod. aguicher tendrait à faire croire que le mot a, pendant plusieurs siècles, complètement disparu de la lang. Mais celui-ci a continué à vivre dans les dial. (voir FEW, loc. cit.), où il a été puisé par la lang. arg. et pop. du xixes. Le rattachement du 1ersens attesté en fr. mod. (« exciter, provoquer, chercher querelle à ») à l'a. fr. « mettre une courroie » peut s'expliquer par le concept commun de « lien », par lequel s'exprime volontiers toute relation, même d'hostilité, entre deux êtres (FEW met en parallèle l'all. anbinden « chercher noise à », ainsi que l'all. anbändeln « faire des tentatives d'approche auprès de qqn », qui, tous deux, font partie de la famille de Band « lien »).
        La filiation sém. en fr. mod. « exciter », « attirer en excitant », « attirer » est simple. G. Straka, Guiche et aguicher ds Mél. Dauzat, 1951, pp. 323-338, tout en recourant à l'étymon a. fr. aguichier, propose l'évolution sém. suiv. : aguicher « attirer par des agaceries » serait la continuation de l'anc. verbe aguicher en passant par les étapes « mettre la courroie à un bouclier », « mettre le bouclier au cou », d'où « attacher, fixer qqc. », d'où « attirer qqn », d'où « attirer la curiosité de qqn », d'où « attirer qqn par des œillades ou par toutes sortes d'agaceries ». L'auteur suppose en outre une influence phonét. et sém. de l'ang. aguigner « surveiller du coin de l'œil... » (Verr.-On.), qui aurait favorisé le passage pour aguicher du sens « fixer, attacher » à celui d'« attirer l'attention par les regards ». L'hyp. de Dauzat Ling. fr. 1946, p. 173 selon laquelle fr. mod. aguicher serait dér. du fr. guiche* « mèche de cheveux », fait difficulté du point de vue chronol. De plus, le 1ersens « exciter, chercher querelle à » serait difficile à expliquer à partir de guiche « mèche ». À cette hyp., comme à la précédente, s'oppose la chronol. des attest. On remarquera toutefois qu'il convient d'accorder moins d'importance à la chronol. des attest. quand il s'agit de faits de lang. relevant uniquement de la lang. parlée.
        Un rapprochement avec le normanno-pic. agucher « aiguiser, stimuler », var. de l'a. fr. aguisier (aiguiser*), (FEW t. 1, p. 26 s.v. *acutiare), ne semble pas à retenir. Il en est de même pour une relation avec l'a. pic. guischier « faire un mouvement brusque de va-et-vient » (empr. à l'a. bas frq. *wiskjan « se glisser », FEW t. 17, p. 599 a; cf. son emploi ds Quinze joyes de mar., XI ds Gdf. : La nuit vient, et sachez que la mere a bien introduite la fille, et enseignee qu'elle luy donne de grans estorces, et qu'elle guische en maintes manieres, ainsi que une pucelle doit faire).
        L'hyp. d'un rapprochement avec l'a. fr. guischier « tromper » (empr. à l'a. nord. vizkr « fin, pénétrant », FEW t. 17, p. 432 b; cf. son emploi en parlant d'une femme ds Foulque de Candie, Schultz-Gora, 1826 ds T.-L. : Si ment et guische come gaite soutaine) est repoussée par FEW t. 17, p. 605 s.v. *withthja.