• CAQ > CAR

    caquer (mettre en caque le hareng)    Empr. au m. néerl. caken « faire une incision sous la branchie gauche  des harengs pour enlever une partie des viscères », néerl. kaken « mettre en caque », dér. de cake (n. néerl. kaak)  « mâchoire, joue; ouïe, branchie » (De Vries Nederl.; De Vries) d'orig. discutée. L'opinion souvent avancée selon  laquelle ce procédé aurait été inventé en 1384 par Willem Beukelszonn, citoyen de Biervliet, est en contradiction  avec le fait que le m. fr. caqueharenc « hareng préparé », empr. au néerl. caecharine « id. » est attesté dès 1332  (Gdf.). Le sens de « mettre en caque » peut être, comme en néerl. (v. De Vries), naturellement issu de celui de «  préparer pour mettre en caque », avec cependant infl. probable de caque* (Bl.-W.5; v. aussi EWFS2).
    caque (récipien)    Prob. empr. à l'a. nord. kaggi, kaggr et aussi kakki « tonneau » De Vries Anord. (De  Gorog, p. 277; EWFS2; v. aussi Valkh., p. 86) que l'on trouve dans le composé vinkaggr « petit tonneau de vin »  (v. De Vries, s.v. kaggi; Falk-Torp, s.v. kagge et kag). Il est probable qu'à partir du mil. du xives. le mot a été  rapproché de caquer*; cependant l'hyp. d'une dér. régr. de ce verbe (Behrens D., p. 60; REW3, no4647; FEW t.  16, p. 296b; Bl.-W.5; Dauzat 1972) fait difficulté du point de vue chronol. L'hyp. d'un empr. au néerl. kaak est  écartée par Valkh., p. 86, ce mot n'étant attesté ds Kiliaen, Etymologicum Teutonicae linguae, 1599 que par une  leçon douteuse.

     

    car    I empr. à l'anglo-amér. car « véhicule sur rails » (1830 ds DAE), lui-même empr. au fr. char sous la forme normanno-picarde car. II abrév. de auto(-)car*.

    carabistouilles (n.f.pl.) (B) vraisemblablement d'origine wallonne carabistouye, p.-ê. dérivé de carimadjoye, caramidjoye, caraboutcha "dessin de toutes les couleurs" ou de caribodèdje, grabouyèdje "traits informes, lettres embrouillées". Grandgagnage (Dictionnaire étymologique de la langue wallonne) le dit peut-être dérivé de craboui, "gribouillis" (dérivé du flamand kriebelen, "fourmiller, démanger, griffonner" et krabben, "gratter"). Jean Haust (Étymologies wallonnes et françaises) le rapproche de "galimatias", du latin grammatica, ou du latin-grec gallimathia (science du coq, coq désinant les étudiants articipant aux discussions réglementaires), voir même du grec κατὰ  Ματθαι̃ον « selon Matthieu » et ferait allusion à la généalogie du Christ (Évangile selon Matthieu, I, 1-17) qui était récitée à l'Église sur un ton de monotone psalmodie, d'où le sens de « discours, psalmodie » donné à un type m. lat. *galimateus, d'où viendrait l'occitan galimatias. Jean Haust note également que le liégeois connaît brôdièdje, "bousillage, patrouillis", dérivé de brôdi "bousiller, travailler mal". Le préfixe cari- a une valeur péjorative, comme le français chari- (charivari), cali- (califourchon), coli- (colimaçon), gali- (galimatias, galimafrée), ca- (cabosser). En wallon, nous relevons les formes aussi variées : cari- (carimadjoye, dessin de toutes les couleurs), cara- (caramagna, rétameur ambulant), car- (carmojhi, se décomposer ; carmoujhner, détruire, décomposer), cra- (crahea, escarbille ; cramignon, danse traditionnelle du Nord de Liège), cal- (calindjî, sanctionner, punir, éprouver), cas- (calmoussî, casmoussî), ca- (caboure, boure de trop, cafougnî, mâchonner, cabolêye, bouillie, etc.).  Cf. également le personnage de Cafougnette dans le folklore du Nord - Pas-de-Calais, une personne inorganisée se disant également « cafouillette » dans la région de Denain.
        Dans l'argot français, carabistouille veut dire "petite escroquerie" : Il marche à la carabistouille.
        L. Sainéan, dans Le langage parisien au XIXe siècle dit : Le composé tarabistouiller, importuner, représente un croisement de deux synonymes : bistouiller, embrouiller, et tarabuster, molester.

    carafée (autre nom de la giroflée jaune ; Can. Contenu d'une carafe), carafet    Originaire du Centre (1840) pour Guiraud. Son consonnantisme est normanno-picard. Il est signalé dans le Glossaire du vendômois de Paul Martellière (1893), et le Glossaire du centre de la France--Supplément au Glossaire du central de la France de H.-F., comte Jaubert (1864), le Vocabulaire langrois (Haute-Marne, Champagne) de Claude Mulson (1822), qui signale une variété Provençale.
        Giroflée. Erysimum cheiri (Cheiranthus cheiri). Giroflée. muré, murer, muret, muretier, murelle (en Picardie), carafé masc. (Indre, Creuse: Fresselines), carafet, carafée (Langrois),  ginofrée (Beauce), quirit (I.Oléron), fenestrelle (Langrois), violette d'hivé, violette sauvage, violette jaune, violette dé gardin, baume dé la résurrection (fém.), giroufliée (Jersey), kiris (-),  garranier, garannier, quarantain(e), sanemonde, sanamonde, salemonde, violier, baguette d'or, bâton d'or, cocardeau.
        On signale aussi l'étymologie gr. karuophullon, de karuon, noix et phullon, feuille. Le nom arabe de la giroflée est "kheri", et "anthos" veut dire fleur en grec, l’association de ces deux mots donne cheiranthus.

    carbonade (n.f.)    1534 (Rabelais, Gargantua, chap. 41, éd. Marty-Laveaux, t. 1, p. 154). Empr., soit au prov. carbonada « viande grillée » (xive s. ds H. Suchier, Denkmäler provenzalischer Literatur und Sprache, Halle, 1883, t. I, p. 209, Diätetik 304), soit à l'ital. carbonata (1re moitié du xive s. ds Batt.), chacun dér. du simple carbon (suff. -ada et -ata, v. -ade, -ée); cf. la formation fr. correspondante charbonnée* et charbonnade (xiiie s. ds Gdf.).

    carbouille (maladie du froment)    Issu, par substitution du suff. -ouille*, de charbucle, lui-même issu, par croisement avec le fr.-prov. bucler « brûler » (FEW t. 14, p. 81a; v. aussi brûler) du lat. class. carbunculus « petit charbon » (d'où régulièrement dér. de l'a. fr. charboucle « escarboucle »). Charbouille : Seules transcr. ds Fér. Crit. t. 1 1787 (avec [λ] mouillée) et ds DG (avec yod) : chàr-boūy', qui transcrit également la forme carbouille : kar-boûy', à laquelle il consacre une vedette de renvoi à charbouille.
        Forme altérée de carboncle, qui s'est dit autrefois pour charbon des plantes et des animaux, et qui vient de carbunculus (voy. ESCARBOUCLE). (Littré).
        Cité comme forme picarde par Hatzfeld & Darmesteter, Traité de la formation de la langue française.

    carcan    Représente le lat. médiév. carcan(n)um (ixes. ds Mittellat. W. s.v., 269, 53), également attesté dans le domaine angl. aux xiieet xiiies. (Latham), d'orig. inconnue. La répartition des formes charchan/carchan (T.-L.; Gdf. Compl.) ne permet pas de leur attribuer une orig. géogr. précise. Les formes en cha- sont peut-être dues à une hyperfrancisation à partir des formes en ca- considérées comme normanno-picardes (v. FEW t. 2, p. 362b). Un rattachement à l'a. h. all. querca « gorge, cou » (Diez5, p. 539), plus spéc. à l'a. nord. kverkband « jugulaire, mentonnière » (Bugge ds Romania, t. 3, p. 146) fait difficulté des points de vue phonét. et chronol. L'étymon arabe ḫalḫal « anneau de la cheville » (REW3, no4002a) fait difficulté des points de vue phonét., chronol. et géogr., carcan n'étant pas attesté en a. prov., mais dans la partie nord du domaine d'oil.

    carcasse   Orig. obsc.; peut-être à rapprocher de l'a. fr. charcois « carcasse » et p. ext. « corps » (1188, A. de Varennes, Florimont, éd. A. Hilka, 2709 : charchois), en picard carcois, carquois, lui-même d'orig. obsc.; un rapprochement avec carquois est improbable. L'ital. carcassa, non attesté av. le xixes., est prob. empr. au fr. (Batt.).

    carde, carder, écarder    xiiie s. « tête de chardon servant à carder » (Tarif de tonlieu ds R. Hist. litt. Fr., t. 6, p. 294), attesté encore au sens de « plante à fouler » en 1601 (O. de Serres, 517 ds Littré); d'où 1366 quarde « peigne de cardeur » (Inv. mobil. d. ducs d. Bourg., i, No. 544 ds Barb. Misc. 13, no 22); p. ext. 1835 « machine à carder » (Ac.). Terme des dial. du Nord (Barb. Misc. 13, no 22) − soit issu d'un plur. collectif *carda formé sur le lat. cardu(u)s « chardon » (Virgile ds TLL s.v., 447, 54), la carde étant faite de plusieurs têtes de chardon − soit déverbal de carder* (FEW, s.v. carduus); cette origine pic. est confirmée par l'orig. géogr. des 1res attest. et l'importance de l'industr. drapière en Flandre au Moy. Âge; v. aussi De Poerck t. 1, p. 55. L'hyp. d'un empr. au prov. carda « chardon » déverbal de cardar « carder », se rattachant au lat. cardu(u)s (EWFS2), fait difficulté des points de vue hist. et géogr.; même difficulté pour un empr. à l'ital. cardo « id. » [xiiie s. ds DEI] (Sain. Lang. Rab., p. 148). Cf. cardon.

    cardon (plante potagère)    1 forme pic. de chardon*, cette plante étant employée dans l'industrie textile, cf. carde1 (v. Roll. Flore t. 7, pp. 8-14 et Barb., loc. cit.).

    caret (Touret ou dévidoir sur lequel le cordier enroule les fils qu'il vient de fabriquer)    Dér. normanno-pic., suff. -et*, de car (char*; v. FEW t. 2, 1, s.v. carrus).

    carin    1365 picard « remise pour les chariots, les outils » (Arch. Nord, B 10836, fo2 ds IGLF Litt.); 1397 (Arch. Nord, B 10349, fo10, ibid.); en usage dans les dial. du Nord et du Nord-Est (Vermesse : karin; Hécart : carin ou kérin). Dér. de car forme pic. et wallonne de char (FEW, s.v. carrus, t. 2, p. 434a); suff. -in* en concurrence dans ces mêmes dial. avec le suff. -il*; dial. -i (Haust : tchèri; Carlier, Gloss. de Marche-lez-Ecaussines, Bull. de la Sté liégeoise de litt. wallonne, no55, pp. 341-414 d'apr. FEW, loc. cit. : kéri); v. aussi E. Gamillscheg, L. Spitzer, Beiträge zur romanischen Wortbildungslehre, Genève, 1921, p. 49.

    carlingue    Empr. à l'a. nordique kerling « femme » et « contrequille d'un navire où vient s'implanter le mat », cf. islandais kerling, terme de marine et suédois dial. kärring « chevalet muni d'un trou où l'on plante la torche de résine », l'acception techn., maritime étant issue de celle de « femme » par une métaphore d'ordre sexuel (H. Falk ds Wörter und Sachen, t. 4, 1912, p. 56; De Vries Anord., s.v. kerling).

    carnaval     1. 1268 wallon quarnivalle (Ord. du duché de Bouill., p. 3 ds Gdf. Compl.); 2. 1549 carneval « fête donnée pendant la période du carnaval » (M. de Navarre, Heptaméron, 3 ds Hug.). Empr. à l'ital. carnevalo, -le (xiiie s. ds Batt.) altération, peut-être favorisée par le lat. Natale « Noël » (cf. P. Aebischer, v. bbg, p. 10) du lat. médiév. carnelevare (965 dans le Latium) bien attesté en Italie du Nord au xiie s. (cf. article cité pp. 4-8) composé de carne « viande » et de levare soit au sens d'« ôter » (cf. le type concurrent en Italie carne laxare) soit par altération plaisante des formules jejunium levare « soutenir un jeûne » (ds Blaise) ou jejunium levare de carne « s'abstenir de viande » (ds Nierm.). L'attest. de 1268 pourrait être due à une relation locale avec des commerçants toscans (cf. FEW t. 2, p. 391b). Le sens premier aurait donc été « [entrée en] carême », puis « veille de l'entrée en carême » par une évolution sém. parallèle à celle de carême prenant.

    carne (Angle saillant d'une pièce d'architecture ou de menuiserie)    Forme normanno-picarde du francien *charne attesté par son dér. charnière*.

    carne (viande)    1 empr. au norm. carne « id. » (Moisy; Dum.; 1823, Orne ds Mém. de la Soc. Antiq. de France, t. 4, p. 320) soit collectif de l'a. norm. carn « viande », correspondant à l'a. fr. char(n) (EWFS2) soit apocope arg. et récente de carnage* par la chute du suff. (FEW t. 2, s.v. caro, p. 392; cf. permission-perme); à l'appui de cette hyp. le lorr. carnage dès 1807 au sens de « mauvaise viande ». L'antériorité du norm. en rapport à l'arg. fr., rend cette hyp. préférable à celle d'un empr. à l'ital. carne « viande »

    carnage    Carnage, prob. forme normanno-picarde de charnage, dér. de l'a. fr. char (chair*), cf. norm. carnage « charogne » (Delbouille), pic. id. « temps où l'on mange de la viande » (Corblet); 3 a peut-être au xvie s., été influencé par le prov. carnatge, attesté au même sens au xiiie s. (Peire Cardinal ds Rayn.) et non par l'ital. carnaggio, attesté très tardivement (xviiie-xixe s. ds Batt.) en ce sens. Cf. carne

    carogne    Début xiiies. pic. caronge (Aiol, éd. J. Normand et G. Raynaud, vers 2766); xives. (E. Deschamps, III, 63 ds Gdf. Compl. : sote caroingne). Forme normanno-picarde de charogne*.

    carqueron, calqueron (Levier interposé entre les marches, dans un métier à tisser, la soie notamment)  D'origine picard (1784) pour Guiraud. Le mot est cité par D'Alambert et Diderot et définit à calqueron.
        Carqueron est un terme de tisserand, lequel désigne une sorte de levier. Le Dictionnaire général (de Adolphe Hatzfeld et Arsène Darmesteter) se demande s'il ne faut pas rattacher le mot au latin calcare  « presser ». Il vaut mieux, il me semble, considérer carqueron comme dériré de carquer, forme picarde de charger. (Antoine Thomas, Mélanges d'étymologie française, 1902).

     

    carvelle ((Marine) (Vieilli) (Désuet) Sorte de clou)    Holl. karveel. (Littré))
    écarver    (é-kar-vé) v. a.   Terme de marine. Joindre ensemble deux pièces de bois ou deux bordages entaillés.
        ÉTYMOLOGIE
           Probablement le préfixe é-, et carvelle, sorte de clou.
        SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
           ÉCARVER. - ÉTYM. Ajoutez : Espagn. escarba, jonction de deux pièces de bois. " L'origine de ce mot est germanique. M. Scheler le rattache justement à l'angl. to scarf, assembler en écharpe des pièces de bois ; allem. scharben ; suéd. skarfva. L'f ou le b est un élément secondaire du radical. Cet élément n'est pas entré dans l'isl. skara, asseres reciproce coaptare (BUGGE, Romania, juillet-octobre 1875, p. 367). "
    angl. carvel-built
        adjective Etymology: probably from Dutch karveel-, from karveel caravel, from Middle French carvelle Date: 1798 built with the planks meeting flush at the seams (New Collegiate Dictionary)