• II. Le picard 8. Influence d'autres langues ? - scots, gallois, irlandais

     

    Le scots : le scots est très proche de l'anglais, mais distinct sur certains points. Notamment certains mots empruntés aux Anglo-Normands y sont encore employés : ashet (assiette), aumry (armoire), leal (mignon, de loyal), backet (auge), corbie (corbeau), cordiner (cordonnier), dambrod (damier, échiquier), to devall (dévaler, descendre), in Lyl(l)is (en toile de la ville de Lille), hogmanay (cadeau de nouvelle année, de hoguinettes, présents, étrennes), chow (dans row-chow, de chole, jeu de boule), garron (bâton de bois, de garron, branchage), to trebuck (râter son tire, son coup dans un jeu, de la forme dialectale de trébucher), sybow (ciboule), to touk (frapper, toquer), rocket (surplis d'évêque, rochet en français de même origine germanique que froc), perk (perche), winch (reculer, en anc.fr. guenchier, se détourner), wastel (gâteau), trink (tranchée), skellet (squelette), feesant (faisant), paster (paturon, de même origine que empêtrer), tri(c)k (tricherie), lignie (ligne, silhouette), to clock (boiter), callan(t) (chaland), dra(i)gon (cerf-volant).

    Remarquons cependant que le scots jedge (jauge) reprend la forme centrale alors que l'anglais dit gauge !

    Parlons maintenant du golf, du mot non du sport, bien sûr. Le mot serait issu d'une racine germanique *keula- « cavité, voûte ; objet rond ». Il donna les mot chole ou choule, parfois soule (XIIe siècle, dans le Roman de Renart, on parle des vilein qui sont à la çoule...) en normanno-picard et colven (XVe siècle) en moyen-néerlandais (en allemand Kolben désigne le « ballon » de distillerie, épi de maïs ou piston, chacun imprégné d'une forme ronde). Colfbane désignait la souloire. Il est interdit en Écosse (gouf) à la même époque. Il devient cependant populaire au XVIe siècle en Angleterre. Le jeu et le mot est réintroduit sous une forme différente au XIXe siècle sur le continent. Le jeu traditionnel reste cependant pratiqué, après quelques années de trêve, sous la forme de soule à la crosse et de kolf. Émile Zola évoque encore le jeu de crosse et la cholette traversant tout le coron et les environs dans Germinal (4e partie, fin du chap. VI, 1885).

     

    Le gallois : Les Anglo-Normands s'installent dans toutes les régions de l'île de Bretagne, donc également en Pays de Galles. Les Cambro-Normands dominent la vie civile du XIIe au XVIe siècle. De cette époque, quelques mots ont pénétrés la langue galloise, d'origine celtique : cordwal / cordwan (cuir [de Cordoue], mot tombé de l'usage), cyllell (couteau), carrai (courroie), cebystr (licou, entêtement, de quevestre, qui en picard a le sens de « licou » mais aussi de « coquin »), casul (chasuble), cannwyll (chandelle), ceffyl (cheval), bacwn (bacon), ffigys (figue), fflair (mauvaise odeur, de flair), ffrwyn (frein, du licou de cheval), gradell (gril, grille), barwon (baron), albrasiwr (arbalétrier, mot disparu), plas (manoir, de palais), pwys (poids), swch (soc), trist (triste)...

    On peut penser cependant qu'une partie ait été empruntée au latin directement, puis revivifiée par les Cambro-Normands, d'où leurs aspects picardo-normands.

    Le gallois a, dans tous les cas, revivifié le breton lors de l'invasion des Britto-Romains au Ve siècle. Cependant, c'est bien le breton qui semble être la langue celte a avoir emprunté le plus de mots picardo-normands.

     

    L'irlandais :

    L'invasion normande de l'Irlande est une expédition militaire normande en Irlande initier depuis le Pays de Galles, qui débuta le 1er mai 1169, sur la demande du roi de Leinster, Dermott MacMurrough alors en exil. En plus des Normands, de nombreuses troupes de mercenaires arrivant de régions même de pays divers participent à la conquête normande de l'Angleterre : des Bretons, des Flamands, des Picards, des Angevins, des Manceaux, des Poitevins, et des Bourguignons, jusqu'à des Germains et des Normands d'Italie, attirés par l'appât du gain, à la recherche de butin et, pourquoi pas, même de terres pour rester définitivement en pays conquis.

    Parmi celles-ci citons : la famille Bailleul (devenu Balliol en Angleterre et en Écosse), une famille appartenant au baronnage anglo-normand originaire de Bailleul près d'Abbeville dans le comté de Ponthieu. La famille, qui conserve de forts liens avec sa seigneurie de Bailleul en Picardie, devient très importante à la fin du XIIIe siècle quand Jean monte sur le trône écossais. La branche principale de la famille s'éteint une génération plus tard en 1363, avec Édouard Balliol lui aussi couronné roi d'Écosse.

    La famille de Clare est une célèbre et puissante famille anglo-normande issue de Godefroi (ou Geoffroy), comte d'Eu, un des fils illégitimes du duc de Normandie Richard Sans-Peur. Arrivée avec la conquête normande de l'Angleterre en 1066, elle joua un rôle primordial en Angleterre, Galles et Irlande jusqu'à sa disparition en 1314.

    La famille de Mandeville, qui tient son toponyme du village de Manneville (Seine-Maritime)1, est une famille d'importance mineure du duché de Normandie qui devient une importante famille du baronnage anglo-normand après la conquête normande de l'Angleterre. Plusieurs de ses membres furent gardiens de la Tour de Londres et comtes d'Essex. La lignée principale s'éteint en 1191, et le patrimoine passe à Geoffrey FitzPeter, par sa femme Béatrice.

    La famille Mortimer est une importante famille du baronnage anglo-normand, issue de la noblesse du duché de Normandie. Elle tient son patronyme du village éponyme de Mortemer (Seine-Maritime) qui, plus tard, s'anglicise en Mortimer en Grande-Bretagne.

    La famille de Warenne, toponyme venant du hameau de Varenne à quelques kilomètres au sud d'Arques-la-Bataille, au bord de la rivière Varenne (Seine-Maritime). Guillaume de Warenne ou de Varenne (William of Warenne ou of Warren en anglais) († 24 juin 1088), fut l'un des compagnons de Guillaume le Conquérant dans sa conquête de l'Angleterre en 1066. Important baron anglo-normand, il fut l'un des hommes les plus riches de l'Angleterre nouvellement conquise. Il fut fait 1er comte de Surrey par Guillaume II le Roux peu avant sa mort. Il fut aussi le fondateur d'une dynastie qui domina le comté de Surrey jusqu'en 1347.

    La famille de Gand plus présente en Écosse et la famille Peverel (Guillaume ou William Peverell) qui serait d'origine flamande.

    La famille de Quinci et de Chokes sont originaires de Quinchy et de Chocques, près de Béthune, un petit groupe de familles flamandes qui avaient reçu d'importantes dotations en terre dans le Northamptonshire après la Conquête.

    Ces familles hiberno-normandes devinrent Plus Irlandais que les Irlandais eux-mêmes (en irlandais : Níos Gaelaí ná na Gaeil iad féin) et s'assimilèrent aux habitants de l'île, sans pour autant apporter un certain nombre de mots durant la période du moyen-irlandais (an Mheán-Ghaeilge). Parmi ceux-ci : seomra (chambre), airseóir (archer), páiste (enfant, de page), coláiste (collège), bagún (bacon), barún (baron), buidéal (bouteille), garsún (garçon), siúinéir (charpentier, de joigneur), baránta (garantie), bárda (guarde), amhantúr (aventure), plúr (farine, de fleur), puinn (point, négation, níl puinn Gaeilge agam, n'est point irlandais à moi, je ne parle pas irlandais)...

    Certains sont actuellement délaissés par les puristes, car considérés comme Béarlachas (anglicisme), alors qu'ils étaient attestés dans la langue avant la forte pression de l'anglais sur l'irlandais à partir du XVIe siècle, et sont donc d'origine norroise ou normande, parmi ces deniers citons : liosta (liste), aidhm (objectif, de aesmer), béarsa (vers).

    La plupart de ces mots ont un accent tonique final, comme le français, et on pense que cela peut expliquer l'accent final de mot irlandais à voyelle finale longue dans certains dialectes où la présence anglo-normande était forte : par exemple, on dit cailín (fille), achainí (demande) dans le Sud-Est (province de Munster), avec accent tonique sur la pénultième, quand l'irlandais standard l'accent tonique frappe la première syllabe.

     

    1 Les familles de Seine-Maritine, sont ici toute à la frontière picarde, donc dans l'aire linguistique picarde.


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