bâbord Empr. au m.néerl. bakboord, de même sens (Saggau 1905, p. 57; Valkh., p. 50), cf. m.b.all. backbord, all. mod. Backbord, ags. boecbord, a.nord. bakbordi. Le m.néerl. est composé du m.néerl. bac, bak « dos » (all. mod. Back) et boord « bord », v. aussi bord (De Vries; Verdam). À l'époque du m. néerl. le pilote gouvernait en effet avec une godille fixée au côté droit du bateau et tournait donc le dos au côté gauche (Diez5). Forme altérée en bas bord, basbord (puis bâbord), par attraction de l'adj. bas*, l'équipage se tenant à bâbord, tandis que le tribord était réservé aux officiers (Will.). L'étymon a.nord. bakbordi (De Gorog, p. 4), ne peut convenir étant donné l'entrée relativement tardive du mot en fr. L'étymon b. all. backbord (Behrens D. 1923, p. 69; REW3) est moins satisfaisant du point de vue hist., les relations maritimes fr. étant beaucoup plus actives avec les Pays-Bas qu'avec l'Allemagne du Nord.
bâche (longue planche utilisée pour revêtir les parois d'un puits de mine) 1406, 27 nov., wallon « planche, pièce de bois » (Record des Voirs jures du Cordeau, Bormans, Gloss. des tanneurs Liègeois, Doc. inéd., IV bis ds Gdf. Compl. : Et desseure ycelle dite greilhe qui est clavee sour une baiche, laqueil baiche est clauee alle halle), attest. isolée; repris au xixe s. 1863 mines (Littré : Bâche [a] Planche sciée en longueur pour revêtir les parois des bures; [b] Espèce de plancher que l'on établit pour faciliter le roulage).
Terme wallon (cf. Haust, p. 68 : Batche « planche servant à cloisonner », correspondant au m. fr. bauche 1332 « tavaillon, planche servant à couvrir le toit d'une maison » (Compte d'Odart de Laigny, Arch. K.K. 3a, fo 135 ro ds Gdf.)); lui-même dér. de l'a. fr. bauch « poutre, tronc d'arbre abattu » 1er tiers xiiie s. (Conq. de Jérus., 3225, Hippeau, ibid.) empr. à l'afrq. *balko « poutre » (a. h. all. balko, balcho, m. h. all. balke, all. Balken). Cf. aussi Du Cange bauca3 ,,tegula lignea`` « tuile en bois servant à couvrir des murs d'écurie ». La chute de l > u devant consonne (et notamment derrière a) est courante dans le nord-est du domaine gallo-roman (cf. le nom propre Willame, fr. Guillaume, amones « aumônes », atre « autre », etc.).
bachelette, baisselette Altération, sous l'influence de bachelier* de l'a.fr. baisselette « jeune fille », 1285 (Adam de La Halle, Li Gieus de Robin et de Marion, p. 362 ds Gdf. Compl.), lui-même dér. de baissele « servante », 1260 (Ech. Val. à éch. S.-Quent., Arch. mun. S.-Quent., 1. 30, A, 4 bis ds Gdf.), dér. de l'a.fr. baiasse, baesse, baisse « servante », 1190 (Evrat, Bible, Richel., 12457, fo24 vo, ibid.), prob. d'orig. pré-indo-européenne (Hubschmid, fasc. 2, p. 160 et FEW, t. 23, p. 140) v. aussi bagasse (empr. au prov. bagassa).
Wallon, bâcèle ; namurois, bauchèle ; rouchi, bacelette ; tous trois signifiant fille. Bachelette est un diminutif de bachele, et bachele paraît être aussi un diminutif de basse, qui, dans l'ancien français et dans le normand, signifie servante. M. Grandgagnage propose pour étymologie le frison bas, bas-saxon baas, maître. M. Diez incline à voir dans basse une forme de bagasse, en italien bagascia, qu'il rattache, d'une façon très dubitative, ou au kymri bach, petit, ou à l'arabe bagî, servante. Mais ne serait-il pas possible de voir dans basse le féminin de vassus, serviteur, et radical de vassal (le changement du v en b, bien que rare, n'est pas sans exemple) ? d'où bacele, bacelete, qui semble si bien correspondre à rasselet (vaslet, varlet), jeune garçon. La forme bachelette, qui ne se trouve pas dans les anciens textes, sera née de basselette qui s'y trouve seule, par assimilation avec bachelier.
bâcholle (casserole de papetier) de bâche* et suff. -olle.
bachot (petit bateau à fond plat) Dér. de bache « bac à passer l'eau » (domaine wallon, 1393 ds Gdf. Compl.) forme fém. de bac*; à rapprocher du lat. médiév. bacca, Kemna, p. 149; Behrens, Beiträge zur franz. Wortgeschichte und Grammatik, p. 336; suff. -ot*.
bâcler Orig. incertaine. L'étymon le plus vraisemblable paraît être un lat. vulg. *bacculare dér. de *bacculum, var. de baculum « bâton » (FEW t. 1, p. 201a; Bl.-W.5; Dauzat 1968), bien que l'attest. relativement tardive du mot fr. (la valeur de l'ex. isolé de 1292 est mise en doute par A. Pruvot ds Fr. mod., t. 22, p. 129) ne vienne pas confirmer cette hyp.; l'intermédiaire du prov. baclar « fermer » (A. Thomas ds Romania, t. 26, p. 427) non attesté av. 1535 (Rayn.) est possible mais incertain. L'hyp. proposée par Barb. Misc., t. 1, no3; Valkh., p. 51, d'un empr. au néerl. bakkelen « geler superficiellement » (Woordenboek der Nederlandsche taal, II, 886 cité par Valkh.) fréquentatif de bakken, backen, attesté en m. néerl. au sens de « coller fortement, attacher » (Verdam, s.v. backen) convient bien du point de vue sém. (l'évolution « coller » > « fermer » n'étant pas invraisemblable) mais fait difficulté étant donné que bakkelen n'est pas attesté en m. néerl. mais en néerl. mod. et seulement au sens de « geler superficiellement » et non au sens du mot de base bakken.
badrée Région., vx. Farine ou autre substance que l'on a délayée dans de l'eau (cf. Hugo, Quatre-vingt-treize, 1874, p. 143).
1. 1505 pic. « farine ou toute autre substance délayée dans l'eau » (Compte, S. Omer, ap. La Fons, Gloss. ms., Bibl. Amiens ds Gdf. : En lait doulz pour les flancs et badrees du couvent pour toute l'annee v. 1. s. VI. d.); 1658 norm. badreye (L. Pet., Muse norm., p. 14 ds Moisy), enregistré en ce sens dans les dial. mod. pic. (Corblet) et norm. (Moisy), ,,anc. et provincial`` d'apr. Guérin; 2. 1876 norm. (Delb. : Badrée. En Normandie, marmelade de pommes ou de poires qu'on étend sur les pâtisseries, sur les tartes); 1880 pic. (Jouanc.), enregistré au même sens en ang. (Verr.-On.) et dans les dial. du Centre (Jaub.), v. K. Bauer, Gebäckbezeichnungen im Gallo-Romanischen, Darmstadt, 1913, p. 11.
Orig. obsc. Rattaché par FEW t. 1, p. 265a au prototype *barrum « boue », par l'intermédiaire d'un dér. *barrǐtum avec sonorisation du -t- avant la syncope. Cependant l'aire géogr. de badrée ne concorde pas avec l'orig. ibér. préromane attribuée à juste titre, semble-t-il, au prototype *barrum par REW3 et Cor., s.v. barro I.
bagnole Terme d'orig. dial., bien attesté dans le Nord et le Nord-Ouest (cf. Littré Suppl. : [...] Une bagnole est, dit-on, dans les Ardennes une mauvaise voiture. Bagnole se dit couramment en Normandie dans le même sens; Moisy : Banniole, bagniole ... carriole, mauvaise voiture [...] I s'cárre dans sa bagniole comme un évêque dans son carrosse; Haust : bagnole ... bicoque; Verr.-On. : vieille voiture, mauvaise charrette. Méchante baraque, cahute), prob. formé sur le modèle de carriole à partir de banne* « tombereau, voiture »; du sens de « tombereau » celui de « cabane » (d'abord maison en jonc tressé, comme l'étaient les premiers tombereaux).
bagnolet
I (coiffe ronde de femme) peut-être issu du terme dial. du Nord-Est bagnolet « petit baquet » FEW t. 1, p. 225a, aussi attesté en Suisse romande, Neuchâtel, au sens de « récipient pour le poisson » dep. 1529 (Pat. Suisse rom., t. 2, p. 233), lui-même dér. (-et*) du lat. balneolum « petit bain ». Bagnolet « coiffure » ne peut pour des motifs chronol. être issu de bagnole « voiture »; ce dernier a pu cependant contribuer à attirer bagnolet dans le domaine de l'argot.
II (prélart, toile de navire) soit dér. de banne sur le modèle de bagnole (cf. banne au sens de toile servant à couvrir les marchandises sur une voiture ou un bateau), soit même mot que le dial. bagnolet « petit baquet » (pour le sémantisme « baquet » > « toile de couverture », cf. bâche < lat. bascauda « récipient »).
bague Peut-être empr. au m. néerl. bagge, bage, de même sens (Verdam); à rapprocher du fris. oriental bâge qui se rattacherait à l'all. biegen « courber » (Valkh., p. 52; EWFS3; Bl.-W.5); à l'appui de cette hyp. la localisation et la forme du mot dans ses premières attest. L'hyp. d'un étymon lat. baca (baie [d'un fruit]*), attesté comme synon. de gemma (Horace, Epod., ds TLL s.v., 1658, 33) puis au sens de « olive servant de fermeture à une chaine » d'où au plur. comme synon. de catenae (Prudence, Psych., ibid., 1658, 44) est acceptable du point de vue sém., mais fait difficulté étant donné qu'elle suppose l'intermédiaire d'un prov. baga « bague » (1462, Pansier), ce qui semble incompatible avec la localisation et la forme du mot dans ses premières attest., v. aussi Th. Braune ds Z. rom. Philol., t. 18, p. 515.
baguier (coffre à bijou) 1562 bagier « petit coffre, écrin pour ranger les bagues » (Reg. aux rendages, Proclamat. pour la vente des biens des mineurs, 2, 3, A. Liège ds Gdf. Compl. : Une forme de lict [lire peut-être : « un bois de lit », cf. en wallon foûme-éclose « alcôve », Haust, s.v. foûme et FEW t. 3, p. 714b, s.v. forma] toute pleine de bagiers d'anticque scrinerie); 1618 (B. du Comité des travaux hist., 1882, p. 301 : Item, une boite de leton, servant de baguier, ouvrée et doublée de velours noir). Dér. de bague*; suff. -ier*.
bahut Orig. obsc. L'hyp. d'une orig. germ. est suggérée par la localisation des premières attest. au nord de la France. Ont été proposés :
− a.b.frq. *baghûdi, *baghôdi « garde, conservation des choses, bahut » Gamillscheg, composé du frq. *bage (cf. m.néerl. bagge, bage « paquet, botte » [attesté en réalité seulement au plur. en ce sens; bagen « bagages » ds Verdam]) et de l'a. frq. *hôdi, *hûdi « protection » (cf. m.b.all. hoden, huden « cacher », Lübben Mittelniederdeutsches Handwörterbuch, 1965);
− m.néerl. *behuut « lieu de protection » issu du m.néerl. behuden « cacher », hyp. qui suppose un passage de be- à ba- en syll. initiale, ce qui pourrait s'expliquer par le besoin de renforcer e en hiatus (cf. un renforcement par -i- dans la forme attestée baiul);
− a.b.frq. *baughud, littéralement « protection, cache pour les objets précieux » fait difficulté du point de vue phonét., le passage de -au- à -a- devant -u- accentué ne pouvant s'expliquer pour un mot d'apparition relativement tardive.
− L'étymon lat. des gloses bacapulus < bacca + capulus fait difficulté du point de vue phonét. et est abandonné par Von Wartburg. − L'étymon lat. bajulus (bailli*) proposé par Diez qui supposait l'antériorité de l'esp. baúl n'est pas acceptable, l'esp. étant empr. au fr.
− L'étymon ar. tābút « coffre, bière » n'est pas acceptable, étant donnée la localisation géogr. du mot fr.
− L'hyp. d'une orig. onomatopéique par dérivation régr. du dial. bahuter (bahurer, bahuler), (Sain. Sources t. 3, p. 146, aussi évoquée par Cor., loc. cit.) paraît peu fondée.
Génev. bahiu ; provenç. bauc ; espagn, baul ; portug. bahúl, bahú ; ital. baule. Ces formes sont trop divergentes pour qu'on puisse déterminer une étymologie plausible. Diez remarque que, si l'on savait que ce mot appartient en propre à l'espagnol, on pourrait croire qu'il vient de bajulus, porteur, en admettant toutefois que l'accent aurait passé de ba sur ju. On fera attention que, tandis qu'en espagnol, en provençal et en italien, bau est monosyllabique, ce qui le représente dans le français et le portugais est dissyllabique. D'après Palsgrave, p. 19, l'h était aspirée. (Littré).
BAHUT, corresp à l'it. baûle, esp. baul, port. bahul, prov. baûc. Les formes avec la finale t font incliner pour l'étymologie de L. bajulus, porteur, déjà proposée par Nicot (comp. it. gerla, corbeille, pour gerula, de gerere, porter) ; il faudra alors admettre avancement de l'accent tonique de l'antépénultième sur la pénultième, comme on le trouve dans esp. casullu de L. casula. Il faut observer que le t final dans bahut étant d'introduction postérieure ne peut être invoqué contre cette étymologie. Ménage, Chevallet et autres font venir bahut du vha. behuotan (all. mod. behûten) garder, conserver ; Mahn invoque le mha. behut, garde, magasin. - D. bahitier. (Scheler).
Bahut. F., pension, école : boite. Bahut spécial, Saint-Gyr. Bahut paternel, maison paternelle. J'ai bazardé tout mon bahut, tous mes meubles, tout ce qu'il y avait dans ma boite. Bahut se disait en v. fr. buhot ; bohote et bohète en rou. veulent dire lucarne et niche qu'on ménage dans un mur pour marquer la mitoyenneté.
Abaïette, en v. fr., a le sens de guérite, échauguette, veillotte, sentinelle.
Bahut : boite et abaïette sont des variantes. Le sens s'inspire chez tous les trois de celui du verbe abéier, abayer, faire attention, veiller.
Bahuter, Saint- Cyr, faire du tapage : bouleverser les meubles, le bahut. Bahuteur, mauvais écolier qui change souvent de bahut, de boîte. Id., tapageur : qui met la boite sens dessus dessous. (Adrien Timmermans, Dictionnaire étymologique, 1903)