•     Une constatation a été faite rapidement par beaucoup : le Corona a changé nos vies, et donc notre façon de parler.

        On ne parle plus que de Home Office, de Click and Collect, de Green-Zone-Strategie, de Hotspot, de Lockdown, et pour ne plus en arriver là de Booster, de Drive-in-Testzentrum et de Tracingapp, tout ça pour en venir à un hypothétique Zero-Covid.

     

    La page https://www.owid.de/docs/neo/listen/corona.jsp enregistre ces nouvelles expressions, et la directrice du département Grammatik au Leibniz-Institut für Deutsche Sprache de Mannheim, Gisela Zifonun [https://www.ids-mannheim.de/fr/sprache-in-der-coronakrise/] s’en sert pour constater la prédominance des anglicismes. L’article commence comme ceci :

    In der derzeit mehr als 1.000 Einträge umfassenden Liste der „Neologismen in der Coronapandemie“ finden sich keineswegs überwiegend, aber doch zahlreich auch Anglizismen. Das war zu erwarten und ist auch gut so. Denn Entlehnungen aus dem Englischen wie Bildungen mit Entlehnungen aus dem Englischen sind heute ein unverzichtbarer Bestandteil des deutschen Wortschatzes und eine Bereicherung, kein Dokument der Armut des Deutschen.

    Dans la liste des « néologismes de la pandémie du Corona », qui compte actuellement plus de 1 000 entrées, les anglicismes sont loin d’être majoritaires, mais ils sont nombreux. C’était prévisible et c’est une bonne chose. Car les emprunts à l’anglais et les formations avec des emprunts à l’anglais sont aujourd’hui une composante indispensable du vocabulaire allemand et un enrichissement, et non un document révélant la pauvreté de l’allemand.

    Moments vécus... en anglais 17

        Si j’accepte le fait qu’une langue doive s’enrichir, là où je ne suis plus d’accord, c’est quand l’apport étranger n’est plus issu que d’une seule source : l’anglais.
       L’auteure (ou l’autrice) continue en citant trois scénarios de cet « apport » :

    • die reibungslose Partizipation (tracken ou tracen), soit la participation sans difficulté qui demande uniquement des adaptations de la prononciation ou une orthographe différente de l’usage ;
    •  die Eindeutschung mit Risiken und Nebenwirkungen (social distancing et soziale Distanzierung),  soit la germanisation avec ses risques et ses effets secondaires, et où la différence de sens entre to distance et sich distanzieren poserait problème ;
    •  die alternativlose Dominanz (Lockdown, Drive-in-Test), présentant une dominance dépourvue alternative, où l’association de mots accolés est plus facile en anglais qu’en allemand ou en français et permettrait donc de s’en débarrasser dans la langue cible.

        Selon moi le meilleur scénario est celui où elle met des réserves. Quand on en vient à ne plus savoir comment écrire et prononcer Home Office germanisé en Homeoffice, Tracking qui se prononcera à l’anglais sans que rien dans l’orthographe ne puisse en faire soupçonner le pourquoi (à la différence de recyclen. Mais quand on doit lire les mots die Triage, der Journalist, ou der Genie, qui sait si l’on doit encore les prononcer à la française ou à l’anglaise ?

        Elle remarque que seule le 2e scénario présente un manque de créativité. Mais l’on peut faire la même constatation pour 3e scénario, car on constate que des termes allemands (Auffrischungsimpfung/Auffrischimpfung « vaccin de rappel », Ausgangsperre « couvre-feu », Heimarbeit « télétravail ») tombent en désuétude (avec le Corona ?) pour être remplacé par des mots et expressions anglais, alors même que la langue allemande est plus flexible que la langue française pour rendre en quelques lettres une idée complexe.

        Alors qu’il est tout aussi normal que la langue fasse évoluer le sens de mots connus. L’anglais le montre également. On l’a vu avec social distancing, mais voyons également le sens de large qui peut vouloir dire big, de domestic qui concerne les affaires intérieures du pays, de actually qui est un faux ami célèbre et de chauvinism qui prend le sens de “patriarcal”.


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  • Nicolas ou Le baiser volé


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  • Définition : abruti, idiot, benêt

    Répartition : Nord-Pas-de-Calais

    Étymologie : citons l'article babaille et babaye dans Jean-Baptiste Jouancoux :
        La première forme est donnée par Corblet, la seconde est dans Cotgrave ; mais, c'est au fond, le même mot qu'on rencontre dans la locution faire la babaille, bailler ou rester la bouche baye, ouverte, c'est-à-dire littéralement faire une bouche d'étonnement devant quelqu'un ou quelque objet. Il y a là la particule ba venue du latin bis, lequel a pris, en passant dans les langues romanes, un sens péjoratif et s'est transformé en bes, ber, bar, ce dernier réduit assez souvent à ba par la chute de l'r. Baille et baye sont des dérivés le premier de bailler, le second de beyer : le primitif est badare, beyer, qui a donné le diminutif badaculare, bailler. Au radical bad qui est dans ces deux mots, se rattache le mot picard beyeuse, spectateur, du verbe beyer, regarder, penser à, qu'on trouve souvent dans le vieux français :
        « Qui honeur cace (chasse, recherche), honeur ataint,
        Et ki à peu bée à peu vient. »
                                        (Bl. et JETAN.)
        – Sire de Joinville, foi que doi vous, je ne bée mie si tost à partir de ci.
                                        (JOINVILLE.)
        J'ai souvent entendu mes bons voisins, les paysans du village de Gentelles, employer un curieux dérivé de beyer : c'est débeyer, loucher. Débeyer est proprement regarder mal, regarder de travers : de là le sens de loucher. Cet emploi de la particule dé au sens péjoratif se reproduira dans plusieurs mots picards, par exemple dans décairier (dérivé de cairier, charrier), qui se dit d'une voiture qui va de travers ou ne reste pas dans la voie.
        Corblet donne babaille comme adjectif féminin signifiant niaise, sotte, et cite le latin babulus comme pouvant avoir donné babaille. Sans compter qu'il est passablement étrange qu'un adjectif venu d'un adjectif latin n'ait pas de masculin, j'observerai que si babulus avait donné quelque chose, il n'eût pu faire que bable, bavle, et, par la chute de l, bave, absolument comme stabulum a fait étable, étavle, étave, comme tabula a fait table, tavle, tave. Dans son Etude sur le Dialecte picard, M. Raynaud a prouvé par des documents que le b de la finale abilis du latin se change en v dans notre dialecte – agréavle, amiavle, waaignavle, etc. - et que tavle rime parfaitement avec les adjectifs en avle du latin abilis. J'ajoute une preuve vivante, c'est qu'on dit toujours tavlée, tablée, s'atavler, s'attabler. Cet essai pour donner une étymologie, essai fort rare chez Corblet, n'est pas très heureux : babaille de babulus ou plutôt de babula, puisque babulus est resté stérile, est de la même catégorie et de la même force que abrier de arbor, affiquer de affidare, ahure de à et heure, anuit de anté noctem, aïude de adjutorium, etc., etc. Je cite ces mots dont je pourrais facilement grossir la liste, non pour le vain plaisir de critiquer, mais dans l'unique but de montrer l'insuffisance de l'ouvrage couronné par la Société des Antiquaires de Picardie, et de justifier ainsi la reprise de ce travail avec une nouvelle méthode et sur un nouveau plan.

     

        Les autres auteurs donnent souvent l'autre sens (maintenant oublié) de « bisou » (Desrousseaux, qui dit aussi babaje, Ed.Edmont, Brûle-Maison) ou de « joufflu » (Desrousseaux, Louis Vermesse, Pierre Legrand).
        babache (qui aime à faire des farces, des fredaines) est un surnom donné par A. Ferraud pour le patois de Jons (Isère).

        Le Géant Babache est le nom du géant de la ville de Maretz.

     

    babache, boubourse

     

     

     

    Le Journal d'Hénin-Liétard, 28 octobre 1900
    sens de "bisou"

     Voir également la chanson Nicolas ou Le baiser volé (deuxième couplet)

     

     

     

    babache, boubourse

     

     

    Lille en 1868 par Debuire du Buc
    sens de "joufflu"

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Boubourse semble assez récent. Je propose deux hypothèses :
    - imitation du bégaiement, d'une personne qui ne sait pas s'exprimer, qu'on ne comprend pas.
    - syllabes redoublées (sur le modèle de bébéte, babache de sens proche) pour bourse (les testicules).

       Vermesse cite entre autres formes de redoublement, le terme boubou pour "faire banqueroute".

        Signalons le verbe boubousser dans la Sarthe (râler), et en créole louisianais boubousse (La Grande Boubousse est un titre du clarinettiste de jazz américain, Omer Simeon, boubousse désigne un gueuleton, une fête).

     

    Exemple :

    boubourse (blog de la Voix du Nord).jpg

    blog de la Voix du Nord

    babache, boubourse


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  • Définition : garde-manger, arrière cuisine, local à provisions sous l'escalier

    Répartition : Nord-Pas-de-Calais (Flandre)

    Dérivé : spintje (diminutif)

    Origine : du néerl. spinde (garde-manger), lui-même du latin spenda "chambre à provision".
    néerl. spinde. S'est propager en allemand Spind (armoire métallique d'ouvrier ou d'écolier) et en luxembourgeois (grande armoire, compartimentée en casiers principalement installée dans les gares) [https://fr.glosbe.com/lb/fr/Spind].

    Exemple :

    spinde (un)


        En face de la cheminée un bas de buffet (spinde) aux formes gondolées, supporte un plateau garni d'un lourd service à café gagné par notre hôte au concours de l'Eté dernier.
    Jules Beck, Un intérieur flamand in La Vie à la campagne, 15 décembre 1929, Le Pays Flamand (p.5) et Le Beffroi de Flandre (2e année, N°22)(p.5)



        Viennent alors la cuisine, la laverie (wassch kamer), la buanderie et la salle aux provisions (spinde). Dans les appentis, derrière, sont les chambres à coucher des jeunes gens : une pour les filles, une pour les garçons, une pour la servante, s'il y a lieu.
    Paul Descamps, Les Populations rurales, La Flandre française (p.72)

        Chaque chaumière disposait d'une petite pièce n'ayant qu'une modeste ouverture sur le Nord avec un sol de terre battue de vingt ou trente centimètres plus bas que le niveau général. Cette salle fraîche tenait lieu de cave pour la conservation des aliments. C'était «de spinde».
    Chaumière en Flandres (Source Sercus ©Village Patrimoine) [https://www.caue-nord.com/fr/portail/41/observatoire/3504/chaumiere-en-flandres.html]


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  • Définition : un cagibi, une remise

    Étymologie : Guy Dubois (Parlez Chti !: Dictionnaire français-chti) le fait remonter à car (hangar pour ranger les chariots...). Jean-Baptiste Jouancoux indique le terme carreterie dans le sens de remise (hangar pour les charrettes et les instruments agricoles). Jules Corblet l'écrit cartrie et indique le mot carnichotte dans le sens de coin, recoin, niche. Hécart note carin et kérin.
        Mais il est également apparenter au français cagibi et cabas. En latin capax (« qui contient ») signifie de façon large un contenant. Du même radical gaulois que cabane, on rapproche aussi ce terme latin de l'arabe قفص, qafas (« cage, panier »). Le mot cabane, cabanon remonte au latin capanna (qui signifie toujours cabane, refuge en italien, mais qui donne dans le même sens cabana dans les autres langues romanes) serait apparenté d'un mot gaulois (gallois cab(an) « lit de camp, tente », breton koban « auvent, baraque », moyen irlandais cap(p) « charrette, bière »).


    Exemple :
        All' cache, all' racache et n' vot rien, ni dins l'carin, ni dins l' puch', ni dins l' pré.
    Jean Dauby, Lexique Rouchi-français suivi de Au long d'un an (1968) [picartext]

        A côté, derrière un bouquet de lilas chétifs, se trouvait le carin, une remise basse, pleine de vieux outils, et où l'on élevait, un à un, les lapins qu'on mangeait les jours de fête.
    Émile Zola, Germinal, chap. III

    carin (un)

    Gîte de location dans un ancien carin de la Cité des Électriciens (Bruay-la-Buissière)

    cliquez sur l'image pour l'agrandir


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